Dunkerque et Plaine Commune : deux territoires moteurs de la cyclologistique avec ColisActiv’

Qu’il s’agisse de convaincre à Dunkerque sans embouteillages ou de relever le défi d’un territoire dense à Plaine Commune, les deux collectivités font un pari commun : la cyclologistique peut devenir un levier de transformation durable. En rejoignant ColisActiv’, elles accélèrent le passage à l’action, entre diagnostics partagés, mise en réseau des acteurs et volonté politique affirmée. Témoignages croisés.

Pour la Communauté urbaine de Dunkerque, la cyclologistique s’inscrit dans une démarche globale de promotion du vélo. « L’idée, c’est de démontrer que le déplacement à vélo sur la communauté urbaine est tout à fait crédible », explique Jean-François Montagne, vice-président en charge de la Transition écologique et de la Résilience.

Le territoire a d’abord expérimenté la collecte de cartons auprès des commerçant·es en vélo-cargo, en partenariat avec l’acteur local Cargoélan. L’initiative a séduit habitant·es et commerçant·es, avant de s’élargir à la collecte des biodéchets auprès des restaurateur·rices. Forte de ces premiers succès, la collectivité a souhaité aller plus loin : “Quand ColisActiv’ nous a proposé d’intégrer le programme, cela nous a semblé naturel. Cela complète notre engagement dans le programme Interlud+ sur la logistique urbaine”, souligne Mélanie Duthoit, cheffe de projets stationnement.

Plaine Commune, territoire dense de près de 500 000 habitant·es en Seine-Saint-Denis, fait, lui, face à de forts enjeux en termes de logistique : 215 000 kilomètres parcourus chaque jour (« soit cinq fois le tour de la terre chaque jour ») et près de 60 000 livraisons quotidiennes. Pour répondre à ces défis, Plaine Commune s’est d’abord lancée dans une première phase d’étude et de diagnostic. Cette approche a permis d’identifier les forces et faiblesses du territoire, notamment un réseau cyclable encore disparate, et un écosystème cyclologistique encore en maturation.

ColisActiv’ : un effet levier pour Dunkerque et Plaine Commune

Dunkerque a pu profiter du réseau de ColisActiv’ pour faciliter la mise en relation entre Cargoélan, et des transporteurs nationaux comme GLS et DB Schenker. “ColisActiv’ nous a apporté un réseau que nous n’avions pas et une légitimité supplémentaire pour convaincre nos partenaires”, ajoute Mélanie Duthoit, cheffe de projets stationnement. À Plaine Commune, Mathieu Defrel souligne également l’importance du volet financier. En effet, pour chaque colis livré à vélo, une prime, financée via ColisActiv’, est versée aux opérateurs de logistique urbaine et aux donneurs d’ordre : “C’est un accélérateur pour aider certains acteurs à sauter le pas et faire émerger des projets. Sans ColisActiv’, cela n’aurait pas été aussi rapide”. Il met également en avant “l’expertise partagée” apportée par les retours d’expérience et enseignements tirés des autres territoires engagés dans le programme.

Le paradoxe dunkerquois : une circulation relativement fluide

À Dunkerque, le principal défi réside dans une faible problématique de circulation. « Lors des entretiens menés par ColisActiv’ lors de la phase de diagnostic, les transporteurs ont expliqué qu’ils ne voient pas d’avantage particulier à passer au vélo plutôt qu’au véhicule léger électrique. Avec une circulation fluide et pas de problème d’accès pour les livraisons du dernier kilomètre, ils n’ont pas d’incitation à changer leurs habitudes », note Marie Leroux, chargée d’études logistique urbaine à la Communauté urbaine de Dunkerque. Il s’agira donc de pouvoir changer certains comportements pour un meilleur partage de l’espace public.

Cette situation paradoxale nécessite une approche volontariste : « Nous allons devoir créer des contraintes qui n’existent pas actuellement », pointe Jean-François Montagne. Un nouveau plan de stationnement est en préparation, avec une réflexion sur les places de livraison et les horaires autorisés. Mais la collectivité reste prudente : « À chaque fois qu’on met des contraintes, il faut que la collectivité soit capable d’apporter des solutions. Sinon, cela ne fonctionne pas. »

La mutation métropolitaine de Plaine Commune

Plaine Commune mise sur les transformations urbaines liées aux Jeux olympiques de Paris 2024 et sur les grands projets d’aménagement pour créer les conditions favorables au développement de la cyclologistique. Mathieu Defrel pointe également des enjeux d’harmonisation de la réglementation, alors que les neuf villes du territoire ne sont pas soumises aux mêmes contraintes, notamment concernant les aires de livraison.

Signe de l’importance accordée au sujet, Plaine Commune a proposé de mettre à disposition un local au pied des bureaux de Plaine Commune, devant le stade de France pour les acteurs de la cyclologistique. “C’est un symbole fort », pointe Mathieu Defrel. Cette initiative exemplaire est d’ailleurs régulièrement citée par l’équipe de ColisActiv’ comme un cas inspirant pour d’autres collectivités.

Un défi commun : la question du foncier

La problématique du foncier apparaît comme un défi pour les deux territoires.

À Dunkerque, Mélanie Duthoit explique : « Les projets d’installation de gigafactory sur le territoire imposent de développer le logement et est donc prioritaire sur les besoins logistiques. » Plaine Commune fait face à un défi similaire et a intégré cet enjeu dans le cadre de son nouveau Plan Local d’Urbanisme intercommunal (PLUi) pour travailler la question de l’implantation et du foncier logistique en milieu urbain.

Vers une transformation durable

À plus long terme, Plaine Commune envisage « une mutation qui permettrait de changer paradigme », comme l’explique Mathieu Defrel. L’objectif est de faire évoluer les grandes plateformes logistiques « vers de la logistique du dernier kilomètre avec des initiatives beaucoup plus vertueuses et beaucoup plus durables. »

De son côté, Jean-François Montagne voit la cyclologistique comme un catalyseur de changement plus profond : « Nous voulons créer des chocs de mobilité, comme nous l’avons fait avec le bus gratuit. La cyclologistique est un levier pour montrer aux Dunkerquois qu’on peut se déplacer autrement. »

Et ses ambitions ne s’arrêtent pas là : « Je rêve qu’un jour, on ait une entreprise de déménagement qui ne fasse que du déménagement à vélo. Cela existe déjà dans d’autres villes, comme à Bordeaux. » Loin d’être utopique, cette projection révèle l’essence même du défi que relèvent ces territoires. Car avant d’être une question d’infrastructures ou de réglementation, la cyclologistique est d’abord une affaire de vision et de conviction : celle que le vélo peut, bien plus qu’on ne l’imagine, apaiser nos villes et transformer les habitudes quotidiennes des professionnel·les et des citoyen·nes.

© Cargoélan